Ajuster l'économie à l'humain
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Ajuster l'économie à l'humain
Relancer l’économie ! Mais attention danger : l’Évangile enseigne la sobriété, le partage, l’amour. Jésus invite à agir contre l’économisme
Que cherchent les décideurs des États, les gouvernants ? Ils veulent relancer l’économie. Christianisme et économisme ne peuvent pas jouer dans la même cour.
Je trouve totalement logique que l’équipe d’Emmanuel Macron ne permette pas aux chrétiens de se réunir le 11 mai. Ouvrir les magasins relance l’économie, permet de nourrir le tandem production - consommation. Ouvrir les lieux de prière, de méditation et de réflexion comporte le risque de la subversion. Pour les catholiques il y a le risque qu’ils entendent et mettent en pratique les conseils de François de Rome. Ce matin, par exemple au cours l’homélie de la prière eucharistique dans la chapelle Sainte-Marthe, il interrogeait les disciples du Christ : « Est-ce que je témoigne de la vie chrétienne, vraiment, avec mon mode de vie ? Est-ce que je prie pour que le Père attire les gens vers Jésus ? »
La vie chrétienne ce n’est pas seulement se rendre à l’église pour une messe. La vie chrétienne, c’est se fortifier en Assemblée - en Église - , se nourrir de toute la personne du Christ pour que l’humanité mondiale vive une relation profonde avec Dieu le Père. Que tous les humains soient frères !
Celui (ou celle) qui se trouve au chômage va, comme E. Macron, souhaiter que l’économie soit relancée à l’ancienne. Pour vivre, manger, se loger, s’habiller… il a besoin d’un salaire. Mais, en fait, c’est qu’il ne comprend pas que les décideurs de l’économisme exploitent sa seule force de travail. Toute l’histoire depuis le XVIIIe siècle du « monde ouvrier » montre clairement comment les dirigeants, présidents et chefs d’entreprise maintiennent les « travailleurs » sous l’emprise capitaliste. Redonner trop vite la liberté de culte, en cette étrange situation de crise sanitaire contient le danger de voir des citoyens chrétiens exiger que l’économie ne soit plus comme avant. La lecture de l’Évangile invite à la sobriété, au partage, au service d’autrui ; par exemple le lavement des pieds de son proche, comme le montre Jésus au moment d’instituer le signe de l’eucharistie : la messe (jeudi saint). Toute la pensée de Jésus invite à agir contre l’économisme. Ce n’est quand même pas cela qu’Édouard Philippe souhaite encourager.
Devant le risque de contamination, pour que soit effectivement relancée l’économie maintenons fermer les lieux spirituels de toutes les religions. Prudence oblige. Tout pour l’économie. On souligne l’opposition à l’Église des dirigeants qui n’ont aucun soucis de la dimension humaine spirituelle. Dans l’Obs, Mgr Matthieu Rougé, évêque de Nanterre. dit : « Quoi qu’il en soit même du fond des choses, le ton du Premier ministre, se débarrassant des religions en trois phrases lapidaires, est indigne de notre démocratie et de la qualité du dialogue que nous nous attachons à mener avec les pouvoirs publics. Pourquoi renouer avec les outrances du « petit père Combes » alors que nous devrions tous nous rassembler pour le bien de notre société ? »
La conférence des évêques de France (CEF) prend acte avec regret» du maintien des restrictions sur les messes : « Nous partageons le souci du Gouvernement de limiter au maximum la circulation de l’épidémie, mais nous voyons mal que la pratique ordinaire de la messe favorise la propagation du virus et gène le respect des gestes barrières plus que bien des activités qui reprendront bientôt. La dimension spirituelle et religieuse de l’être humain contribue, nous en sommes persuadés, à la paix des cœurs, à la force dans l’épreuve, à la fraternité entre les personnes, et à toute la vie sociale. La liberté de culte est un élément constitutif de la vie démocratique. »
Pour approfondir sur ce point cultuel, je dépose ci-dessous, deux documents en PDF. L’un rédigé par René Poujol, Déconfiner les églises ou déconfiner l’Église ? L’autre, Les églises fermées, un signe de Dieu ? par Tomás Halik
Seulement, par les évêques la source du problème de l’actuelle situation n’est pas évoquée. Personne à la CEF n’interroge l’économisme mondial. Pourtant de nombreuses voix soulignent clairement l’état de la question. Je ne prends que deux témoignages pour le démontrer. L’un dans le quotidien La Croix, l’autre dans les milieux des objecteurs de croissance. La Décroissance. Deux médias qui ne nagent pas dans les mêmes eaux.
La Chronique de Flore Vasseur - La Croix du 20 avril 2020
Pourquoi mettre en doute un système assis sur la croissance reste-t-il un blasphème ?
Invoquant la liberté de consommer et agitant la peur de la perte d’emplois (Donald Trump ne se revendique de rien d’autre), les promoteurs de la croissance semblent vouloir prendre les rênes du déconfinement et du monde « d’après ». En France, le Medef veut suspendre les « restrictions » environnementales à leurs affaires, rattraper les jours de travail perdus. Quand le président de la République décide, contre l’avis du Conseil scientifique et de l’Ordre des médecins, de rouvrir les écoles pour relancer l’économie, il semble obéir à la même injonction. Dès lors qu’il s’agit de survivre, est-ce seulement la question ? Et pourquoi refuser a priori l’idée même qu’il puisse en être autrement ? Pourquoi mettre en doute un système assis sur la croissance reste-t-il un blasphème ? Qu’est-ce qui fait si peur ? Cela me turlupine depuis longtemps.
En fin d’article, elle écrit : « Embrasser la décroissance pourrait bien être le seul progrès possible, le seul véritable projet de vie. Ne hurlez pas, je sais : ce n’est pas un petit ajustement mais un changement de paradigme qui bouleverse absolument tout. Cela passe par un autre système de valeurs, basé sur l’utilité sociale, le lien et l’ancrage. La frugalité, la solidarité et le temps long. Le sens et la justice. C’est tout sauf un renoncement. C’est même sans doute un affranchissement, ce qu’il nous est peut-être proposé de vivre. D’incarner. Mieux que n’importe quelle thèse, n’importe quel livre, le Covid nous en donne un aperçu en taille réelle et propose : composez avec moi, la mort, acceptez vos limites. Ou passez à côté de votre temps. C’est-à-dire, de votre vie. »
Les délires de la géo-ingénieries. Le Progrès m’a tué (2015)
Au lieu d'interroger les impasses du progrès technique, qui s'incarne dans le gigantisme des infrastructures et la complexité croissante des dispositifs numériques, au lieu de promouvoir des formes de low-tech privilégiant le travail humain et la baisse des consommations, les innombrables promesses technologiques hors-sol véhiculées à l'occasion de la COP 21 capturent l'avenir et ne cessent de corrompre l'utopie. La réponse la plus évidente et la plus efficace aux changements climatiques consisterait à ne plus émettre de gaz à effet de serre, ce qui impliquerait évidemment de remodeler en profondeur nos imaginaires, nos rapports sociaux et nos modes de vie façonnés par deux siècles de dépendance aux énergies fossiles et au gigantisme des macro-systèmes techniques. Il faudrait repenser l'urbanisme et abandonner l'automobile, ou du moins la brider massivement, limiter le transport aérien, accroître considérablement le coût de l'énergie consommée, s'habituer à avoir plus froid en hiver, retrouver l'usage de nos jambes, diminuer l'emprise des objets et gadgets dits «intelligents» au lieu de nous en rendre de plus en plus esclaves.
Mais rien de tout cela ne compte réellement ni n'est envisagé par ceux qui ont le pouvoir. À l'inverse, ils promeuvent de plus en plus les seules réponses technoscientifiques et la géo-ingénierie, et ne cessent de réactiver le progrès technologique comme la seule façon de construire le futur. Longtemps considérée comme un délire de savant fou ou un résidu des projets militaires de la guerre froide, la géo-ingénierie, qui consiste à modifier le climat par une intervention technoscientifique - par exemple en injectant du soufre dans l'atmosphère comme le recommande le chimiste Paul Crutzen -, est peu à peu acceptée et promue comme la seule solution viable, la plus simple aussi car la seule qui n'implique aucune modification des rapports socio-économiques dominants '. Cette géo-ingénierie trouve ainsi droit de cité dans le dernier (le 5e) rapport du Giec, et elle est vantée par une alliance de plus en plus large de businessmen et de politiques.