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L'instant devenait jouissif... Photo by Stephane YAICH on Unsplash

L'instant devenait jouissif... Photo by Stephane YAICH on Unsplash

Veröffentlicht am 29, März, 2022 Aktualisiert am 29, März, 2022 Kurioses
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L'instant devenait jouissif... Photo by Stephane YAICH on Unsplash

L'instant devenait jouissif, sa voix ne trembla pas quand il signala à son ami son incorrection :

 — Article huit, code comportemental sept, page douze, neuf heures trente du matin, il est  écrit ceci : 

Tout être entrant dans un magasin quelconque, se doit obligatoirement d'expliquer le motif de son intrusion chez le modeste commerçant. Sans motif réel les peines sont les  suivantes... 

 

Je t'épargne les détails, dit-il en posant ses  lunettes. Puis il ajouta :

 

 —  Personne ne va chez un boucher pour parler littérature !

 

Silence. Le chow chow l'écoutait, pas un geste, pas un signe. Son regard ne le trahissait pas. Lucien ne supportait pas cette réaction, alors il s'enflamma, il partit et déclama des heures durant des articles, des alinéas, des numéros de parution au bulletin officiel, les heures passaient, aussi longues que son costard trois étoiles...

 

Ces heures sont là pour rappeler que tout ce charabia incompréhensible jetterait le moindre soupçon d'envie à un autodidacte de s'informer. La loi, elle, reste claire sur une seule chose, les peines !

 

Albert acheta une crème protectrice, il ne tenait décidément pas à sortir de la bulle atmosphérique, périr ou se transformer en mutant, par le simple fait de s'être aventuré une fois de plus au dehors de ces collines, afin de saluer l'être unique qu'il pensait ami, et qui jamais ne lui pansait ses plaies...

 

            Des cicatrices circulaient en virgule sur le toit du monde.

***

 

Fernande était exaspérée, elle n'en pouvait plus !

 

Son image subissait l'effet de tous ces ragots qui couraient sur le dos de son mari. Aucun respect de son statut de pharmacien, le village parlait sans propos sur son dos, tout haut, sans aucune peur des représailles. Julie, cette belle braque, elle la tuerait de ses propres pattes, s'il le fallait, pour sauvegarder son  honneur !

 

            La sharpei se souvenait si jeune, si naïve, lorsqu'elle signa ce contrat la liant à tout jamais à ce bouledogue. Elle se souvenait des préventions de monsieur le maire : cette signature représente le meilleur et le pire, vous devez supporter les deux. 

 

Elle ne connut jamais le meilleur, maintenant elle atteignait le pire...

 

Incapable Fernande de réfléchir sur ses propres tords. Elle laissait son mari perdre ses ardeurs, ce cher et tendre s'assoupissait de jour en jour, jusqu'au jour où s’élevèrent les premières rumeurs sur ce désir de la rendre cocu aux yeux de tous. Elle nourrissait une colère si profonde qu'elle serait capable de vivre ou survivre quelques siècles de plus pour l'assouvir. Cette colère, cette haine était son but, son Graal !

 

Elle se méfiait tout de même car, ici, sur cette planète, la justice se montrait aussi sévère dans les rares procès d'adultère, contre le fautif ou l'être diffamant, pas de fumée sans preuve. Condamnée à se taire, cette chienne, attendait sans patience que la vérité s'éclaire...

 

Pour se distraire de ses siècles futurs d'errance, elle passait son temps à nuire aux autres. Fernande tenait un réseau d'informations de mégères prêtes à tout pour déclarer la moindre forfaiture sur la place publique. De leur union naquit un journal, seule naissance que toutes ces chiennes réussirent à mettre au monde...

 

Ce journal, sans souci d'originalité, n'était pas très beau, un peu vétuste, son information générale laissait coi, parfois. Pourtant sa réalisation prenait tout leur temps, en dehors des tâches ménagères qu'elles ne pouvaient omettre de s'acquitter, ne délaissant leurs fourneaux que pour faire résonner leurs satanées langues de vipères, animal dont je respecte toute l'intégralité, sauf la langue !

 

Ce matin, au marché, sa colère était profonde. Fernande se promenait au hasard de ses pas. Elle sentait pesant sur ses épaules ces airs moqueurs, ces regards insoutenables, sortant de l'iris de ses pleutres de voisins. Les bergères, les Mastiffs, les Terriers arrêtaient soudainement de pavoiser dès son approche. Puis, un léger murmure s'élevait dès la disparition de son ombre. Ce son grossissait, s'amplifiait, jusqu'à ne devenir plus qu'un immense rire. 

 

« L'insoutenable légèreté de l'être... »

 

Elle suivait son chemin, continuait sa route l'air de rien, or elle sentait poindre au fond de son cœur  une pointe d'amertume. Dans son dos, les pattes se fixaient sur elle, la tuant dans son amour propre ; cette zone si sensible à ne pas approcher. Sans se laisser abattre moralement, elle évitait l'affrontement, ses viscères n'en pouvaient plus de se contenir, sa gueule se remplissait d'injures. Elle fuyait lentement. Ces chiennes connaissaient pourtant son énorme caractère. Elles oubliaient  seulement que ce fait n'était plus à démontrer...

 

***

 

Lucien bleuit, sous l'effort mnésique, afin de se souvenir de l'intégralité du code du pharmacien. Chancelant, son teint devint mauve, mauve pâle, une parcelle de jaune au creux des yeux. Réaction normale, si l'on tenait compte de son âge, un tel effort de volonté n'était pas vraiment très courant chez un vieux. Le goût de l'effort était inexistant chez Lucien. Il aurait pu quitter le monde sur ses souvenirs d'étudiant, ou mieux, finir sa vie tranquille, nourri, logé, dans un asile. Or détrompez-vous, il n'en fut  rien !

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