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Notre petit secret...

Notre petit secret...

Veröffentlicht am 7, Aug., 2024 Aktualisiert am 7, Aug., 2024 Humor
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Notre petit secret...

 

Le domaine des GranDesPuits ressemblait à n’importe quelle bâtisse aussi immense qu’ancienne. Depuis l’extérieure les dorures brillaient de mille feux, mises en valeur par les rayons du soleil. Dans la grande cour, le couple formé par la cousine Alexia et son mari Julien avait revêtu leurs plus beaux habits pour l’occasion.

— Le domaine est aussi somptueux que dans mes souvenirs, il n’a absolument pas souffert du temps, commenta la femme en montant l’escalier qui venaient à la grande porte.

Un domestique, un homme en costume leur ouvrit et les pria d’entrer.

— Waw, la barraque de riches !

Elle donna un coup de coude dans le bras de son mari en avançant.

— Ne parle pas ainsi, tu n’es pas dans ta vieille cité ici !

L’hôte, Albert Despuits les accueillis et embrassa sa cousine sur une joue.

— Ma cousine. Avez-vous fait bon voyage ?

— Merveilleux. Les routes ont été impeccablement dégagées, vous nous avez déroulé le tapis rouge.

— Le chemin est entretenu en permanence. Mais que vous l’ayez remarqué me fait grandement plaisir. Mais avancez donc, tout le monde est déjà arrivé.

Tout le monde ? pensa Julien.

Effectivement, dans la grande salle à manger tous les invités fêtaient déjà les retrouvailles. La table qui trônait était suffisamment longue pour recevoir toute la famille.

— Cousine Alexia !

Une autre femme vint en sautillant presque avec ses petits talons. Elles se prirent rapidement dans les bras en se faisant la bise.

— Comme je suis heureuse de te voir. Tu as tellement grandi. Tu es devenue une magnifique jeune femme.

Alexia sentit ses joues rougir et joignit les deux mains.

— Merci cousine Pauline. Tu es également très élégante.

— Ohhh, merci. C’est une robe d’un grand couturier. Un contact de mon mari. Sais-tu que Benjamin travaille désormais dans la haute couture ? Il s’occupe de la gestion des ateliers. Tu verrais toutes les toilettes qui remplissent mon dressing…

La robe en soie fine était ajustée à sa taille puis évasée pour former un grand cercle autour d’elle. A ses côtés, Alexia qui portait un simple tailleur d’une valeur de quelques centaines d’euros se trouvait presque misérable.

— Je te présente mon mari, Julien, dit cette dernière pour changer de sujet.

— Enchantée, s’exclamait poliment le jeune homme en souriant.

— Tout le plaisir est pour moi Monsieur. J’espère que vous avez conscience de la chance que vous avez d’accompagner une femme si parfaite. Ce n’est pas n’importe qui que vous avez à vos côtés.

— J’en ai tout à fait conscience, répondit-il en regardant affectueusement sa femme.

Après quelques autres salutations, Alexia se vit proposer une coupe de champagne qu’elle accepta avec enthousiasme. Ces grandes réunions de famille étaient chaque fois des épreuves. Elle qui avait opté pour une vie simple et sans artifices, ne se sentait jamais à sa place parmi eux.

Un peu à part, Julien admirait tous les trésors exposés. Des toiles au mur dans des cadres doré, aux vases démesurés en cristal, jusqu’aux chaises… Oh. Mais que voyait-il donc ? Qu’est-ce que ce papier faisait là ? Posé sur l’assise en tissu. Il le saisit et s’aperçu qu’il s’agissait d’une enveloppe en papier raffiné. Si d’abord il voulut demander qui l’avait égaré, dans un second temps sa curiosité lui fit de nouveau défaut. Il s’éloigna légèrement et l’ouvrit en se tenant dans un coin. Devant la fenêtre il donnait l’illusion d’admirer le jardin, pendant que ses mains touchaient le papier. Il baissa les yeux juste le temps de lire l’inscription sur la carte et la replaça sans attendre dans l’enveloppe. Les lèvres pincées, il se forçait à ne pas ouvrir grands les yeux. Non, personne ne devait voir la surprise sur son visage. Il se racla la gorge en revenant auprès de la table. Toujours en toute discrétion, il reposa l’enveloppe sur la chaise et reprit un air naturel.

Chut, c’est un secret.

Que signifiaient ces quatre mots ? De quel secret était-il question ? Julien, grand curieux, voulait absolument savoir de quoi il retournait. Se connaissant il ne trouverait jamais le sommeil s’il n’avait pas le fin mot de l’histoire.

Alexia demeurait en grande conversation avec son neveu. Il revint tout près d’elle, se présenta au neveu en question puis pris sa femme par la taille en lui murmurant à l’oreille.

— Il y a un secret dans ta famille.

La cousine se recula vivement en le dévisageant. Content de ce qu’il venait de découvrir, Julien lui fit un large sourire.

— Qu’est-ce que tu racontes ? chuchota sa femme.

— C’était sur une carte, dans une enveloppe. Il y avait marqué que c’était un secret.

Alexia n’y comprenant rien, le suivit jusqu’à la chaise où il avait reposé la preuve de ce qu’il disait. Seulement, nulle enveloppe ne se trouvait là où il l’avait laissé.

— Quelqu’un la prise, dit-il pour se défendre.

— Tu me racontes des sottises !

— Absolument pas. Je n’oserais jamais.

Julien regarda mieux, tirant doucement la chaise pour s’assurer que l’enveloppe n’était pas tombée par mégarde.

— Elles sont magnifiques n’est-ce pas ? Des chaises très anciennes de style Louis XVI. Je les ai fait restaurer cette année.

Albert Despuits affichait fièrement son mobilier. Il lui avait coûté une petite fortune et il aimait en faire les louanges dès qu’il recevait des invités.

— C’est le mot, magnifiques, enchainait Alexia.

Julien qui se faisait d’habitude discret, se mit à quatre pattes pour passer la tête sous la table. Alexia ne le vit pas tout de suite, c’est seulement lorsqu’Albert lui demanda si son mari avait égaré quelque chose qu’elle baissa la tête. D’un petit coup de pied elle l’alerta qu’il était repéré et Julien se remis sur ses jambes en passant ses mains sur son costume.

— Pardonnez-moi, j’ai cru voir quelque chose. Mais ce doit être un tour de mon imagination.

Albert s’amusait de la situation et se retourna vers d’autres membres de la famille.

— Tu vois il n’y a rien, râla Alexia à son mari. N’oublie pas où tu trouves Julien, tu ne peux pas te mettre parterre comme ça, c’est extrêmement mal élevé.

— Je te promets qu’il y avait une enveloppe, insistait-il.

Agacée, Alexia rejoignit une autre tante et engagea la conversation. Mécontent, Julien lui fit le tour de la grande table pour vérifier chaque chaise.

— Cherchez-vous quelque chose jeune homme ?

Il se redressa vivement, comme pris en faute en fixant l’oncle Albert.

— Absolument pas. J’admirais vos splendides chaises, elles sont d’une rare beauté.

— Ce sont des chaises anciennes du sty…

— Louix XVI, oui j’ai entendu vos mots envers mon épouse.

L’oncle retourna le dos au mari qui jeta un œil sur la table, passant en revue les espaces entre chaque couvert. Rien n’apparut dans son champ de vision. Il était pourtant convaincu de n’avoir pas rêvé cette enveloppe. Et encore moins le mot secret sur la petite carte qu’elle contenait.

— Monsieur Julien.

Il tourna la tête, juste quand Pauline vint auprès de lui avec un homme à son bras.

— Voici mon mari, Henry. Julien est le mari de cousine Alexia. Tu sais ma cousine favorite, rappelait la femme en riant.

— Ravi de faire votre connaissance Monsieur Julien.

— Vous pouvez m’appeler simplement Julien.

— Chéri, pourquoi n’irais-tu pas nous chercher quelques coupes ? Monsieur Julien a vidé la sienne il y a déjà longtemps.

Le dit Henry était aussi vêtu d’un costume d’une grande valeur qu’il avait dû acquérir grâce à son poste dans la mode. Il fit demi-tour pour aller trouver les dernières coupes de champagne.

— Mon cher Julien, je vous observe depuis un moment. Vous semblez bien nerveux. Je vous vois partir d’un côté, puis de l’autre. Tourner autour de la table. Il m’a même semblé vous avoir vu vous agenouiller sur le tapis et passer une tête sous une chaise.

— Hum…c’est-à-dire que… voyez-vous, j’ai égaré quelque chose.

— Mince, vous m’en voyez désolée. Peut-être puis-je vous aider dans vos recherches ? A quoi ressemble ce que vous avez malencontreusement égaré ?

— Une enveloppe. Pas très grande. Elle était posée sur une chaise. J’ai fait le tour de toute la table et ne l’ai pas retrouvée.

— Ca alors, quelqu’un l’aurait prise ? Cette lettre contenait quelque chose d’important ?

— Plus ou moins…

Pauline restait sur place, dans l’attente d’en savoir plus.

— Il s’agit d’un secret, murmura Julien se penchant vers elle.

Les yeux de cette dernière s’ouvrirent un peu plus grand.

— Comme c’est excitant. J’adore les secrets, confia-t-elle à voix basse. Savez-vous de quoi il retourne exactement ?

— Heu, non. J’espérais que vous auriez des réponses.

— Malheureusement non. Mais je suis une détective hors pair, avant la fin de cette soirée, je connaitrais tout de ce secret et le partagerais avec vous.

Henry revient avec une coupe de champagne. Julien la saisit et en bu une première gorgée.

— Je vais commencer mon enquête, lui intima Pauline.

La cousine tira doucement une chaise pour s’asseoir et croisa élégamment les jambes. Discrètement elle fit un tour d’horizon de la table et des invités qui jacassaient. Aucun ne semblait avoir d’enveloppe en sa possession. Ce Julien avait-il bien vu ?

— Tante Pauline, que faites vous assise ici ?

Elle se redressa en voyant sa nièce arriver devant elle.

— Oh je me reposais, juste un instant.

— Vraiment ? Je vous ai vu toiser la table d’un œil sérieux. Quelque chose vous chagrine-t-il ?

— Non. Absolum… En fait, enchainait-elle en parlant à voix basse. Il semblerait qu’il y est une enveloppe contenant un secret.

La nièce en l’entendant s’assit sur la chaise d’à côté, souhaitant avoir plus d’informations.

— Une enveloppe ? Mais quel secret ? Tout cela est très intriguant.

— Intriguant et excitant, ajouta Pauline. Je tiens cette information du mari de cousine Alexia. Mais la dite enveloppe a disparu.

— Ca alors. Mais comment est-ce possible ?

— Je l’ignore, mais je ne quitterais pas le domaine avant de savoir. Me connaissant je risquerais de ne pas trouver le sommeil. Et les insomnies ne me réussissent pas. Généralement elles me provoquent des maux de tête, des cernes dignes des grands pandas et j’ai les intestins dérangés. Il faut absolument que je sache. Ou ma santé sera en jeu.

— Je vous soutiens ma tante. Je vais chercher avec vous si vous le voulez bien.

— Bien-sûr. Seule, je crains de ne rien découvrir et que cette soirée soit synonyme de frustration. Ce serait fort regrettable, je me faisais une telle joie de revoir la famille.

— Et moi dont. Par où commençons-nous ?

Elles réfléchissaient quand le neveu Franck surgit devant elle.

— Que complotez-vous toutes les deux ?

— Chuuut, répondit Pauline en mettant un index sur sa bouche. C’est un secret.

— Pfff, raillait le neveu en faisant rouler ses yeux.

— Mais ne sois pas si impoli. De plus tante Pauline dit la vérité, il y a un secret.

— Mouais… C’est cela, dit le jeune homme d’une manière nonchalante.

— Mais puisque nous te disons que cette information est sérieuse, râlait la nièce Julie. Même que nous avons un témoin.

— C’est cela, répétait le neveu. Et c’est quoi vot’ secret ?

— Je veux bien te donner les premiers indices, mais tu dois rester discret et ne pas te moquer de nous.

— Je m’y engage, répéta solennellement le neveu à sa sœur.

— Bien. Il est question d’une enveloppe qui a disparu.

— Et quoi d’autre ?

— Pour le moment, c’est notre meilleur indice. Et le seul que nous ayons, avoua Pauline en grimaçant.

— Comment ? Et vous prétendez que c’est sérieux ?

— Mais c’est sérieux, dirent en chœur la tante et la nièce en s’agaçant.

— C’est cela…

— Mes chers convives, interrompit Albert Despuits en se mettant en bout de table. Je vous propose de nous mettre à table pour commencer notre grand diner de famille annuel.

Tous les invités s’assirent. Julien qui n’était absolument pas à l’aise avait les yeux qui scrutaient chaque centimètre du couvert. A sa droite, Alexia se tortillait sur sa chaise.

— Un problème ? lui intima son mari.

— Tu m’as provoqué un stress avec ton histoire de secret. Et tu n’es pas sans savoir que chaque fois que j’ai une émotion forte une plaque d’eczéma sort à un endroit hasardeux de mon corps. Je crois que cette fois-ci elle se situe à l’arrière de ma cuisse droite.

— Veux-tu que je gratte pour te soulager ?

Furieuse qu’il se moque d’elle, elle lui donna une tape vive sur la jambe sous la table.

— C’était juste pour rendre service, enchainait Julien en souriant.

— Ce soir tu dormiras sur le canapé, ça t’apprendra.

Cette plaque d’eczéma a redonné l’air joyeux à son mari qui a oublié le secret qui le perturbait une minute plus tôt. Alexia quant à elle, continuait à bouger aussi discrètement que possible sur sa chaise pour soulager sa démangeaison.

En face du couple, les frères et sœurs Franck et Julie chuchotaient toujours. Les yeux de leur tante Pauline les observaient. Alexia aurait parié qu’elle essayait de lire sur leurs lèvres pour ne rien manquer de leur échange.

— Mais arrêtez donc de jacasser tous les deux. Ou au moins partagez avec les autres. Qu’avez-vous d’aussi passionnant à raconter qui ne peut attendre la fin du repas ?

L’horrible grand-mère Ursula qui faisait peur à regarder, avait utilisé sa voix suraiguë, rappelant sa présence au passage.

— Rien, dit immédiatement Julie en rougissant.

— On peut pas l’dire, c’est un secret, ajoutait son frère.

Tous les yeux se tournèrent vers eux. Surtout ceux de Julien. Pourquoi ces deux-là savaient pour le secret ? De quel droit pouvaient-ils être au courant ? Il eut envie de crier à l’injustice.

— Un secret ? répétait Albert Despuits en accrochant sa serviette de table au col de sa chemise.

— Ouais, une histoire d’enveloppe.

— Mais TAIS-TOI ! hurlait Julie à son frère en l’attrapant par le col pour le secouer comme un prunier.

Alexia les regardait, tout en se tortillant toujours plus. La plaque devait gagner du terrain.

— De quoi parlez-vous donc ? Voyons, il n’existe aucune enveloppe secrète à ma connaissance.

— Mais vous n’êtes peut-être pas au courant de tout ce qui se passe dans cette demeure, répondit Pauline d’un ton sarcastique.

— Tout de même. J’habite ici depuis ma naissance. S’il était question d’un secret entre ces murs, j’en serais le premier averti.

— La preuve que vous ne savez pas tout, s’entêtait tante Pauline en le pointant du doigt.

— Asseeeez ! criait Julie en se levant et tapant des poings sur la table. Il y a un secret et le mieux pour qu’il ne cause pas de soucis à quiconque est de le révéler une fois pour toute. Alors ? Qui parle ? N’ayez pas peur, ne soyez pas timide. La vérité éclatera forcément, autant que ce soit maintenant et qu’on en parle plus.

Tous les visages se tournaient et les yeux s’observaient.

Albert Despuits prit une gorgée du bordeaux qu’il avait dans son verre et le replaça au-dessus de son assiette.

— Mes enfants, quel que soit ce secret vous êtes visiblement tous au courant. Dans ces conditions, s’agit-il toujours d’un secret ? Y a-t-il encore un intérêt de savoir de quoi il retourne ?

Alexia continuait de se tortiller en souhaitant plonger dans son verre et disparaitre. Julien décala légèrement sa fourchette et son couteau. Les frères et sœurs n’échangeaient plus un regard, Franck n’avait pas du tout apprécié la manière dont Julie l’avait secoué comme une poupée de chiffon. Pauline était la seule encore très vive et à la recherche du moindre indice.

— Vos propos font-ils office de preuve qu’il existe bel et bien un secret ? Tout ce mystère est captivant. Mon cher Albert, j’ignorais que vous étiez maitre pour animer les grandes soirées.

— Je ne fais que reprendre vos propos Pauline, vous semblez tous si convaincus qu’il y a une énigme à résoudre. Seulement je m’interroge sur la véracité d’un secret dont tout le monde connait l’existence. A titre personnel, ça ne m’intéresse guère de connaître une information connue de tous. Il n’y a aucun intérêt.

— Si je peux me permettre, intervint Julien en levant un index. Savoir qu’il y a un secret n’est qu’un premier élément, mais pas celui qui nous intéresse le plus. Non, ce que nous voulons c’est connaitre le secret en question.

— Me voilà entièrement d’accord avec vous jeune homme, le soutint Pauline. J’approuve grandement vos propos. Alors ? Quel est le secret ?

De nouveau les regards se croisèrent. Alexia remuait sur sa chaise et Albert réajustait la serviette à son col.

— Quelqu’un a déposé cette enveloppe et écrit ce mot à l’intérieur, répliquait Julien en haussant le ton. Qui et pourquoi ? La personne connaissait le secret et voulait forcément le révéler.

— A moins qu’elle cherche juste à faire une mauvaise farce.

Tous les visages se tournèrent vers Albert qui reprenait une gorgée de vin rouge.

— Après tout, cela aurait pu être drôle et mettre de l’animation à la soirée, ne trouvez-vous pas ?

— C’est vous ! s’écria Pauline en ouvrant sa bouche en O. En tant qu’hôte de cette demeure, vous étiez le mieux placé pour mettre en place cette mascarade. Vous vous êtes moqué de nous, s’agaçait-elle en devenant aussi rouge que la nappe sur la table.

— Moi ? fit-il innocemment. Je n’étais même pas au courant d’un quelconque secret avant que vous en parliez.

 

Pendant ce temps, deux des domestiques Pola et Bérénice, s’affairaient en cuisine. Elles entendaient le brouhaha dans la pièce à côté et s’interrogeaient sur l’origine de tout ce remue-ménage.

— Il y a un problème avec le repas ?

Pola avait posé la question tout bas à sa collègue quand un troisième domestique avec le visage rouge et qui s’essuyait le front avec un mouchoir vint les trouver.

— Seigneur tout puissant, il s’est produit quelque chose.

Les deux femmes furent au bord de la panique dans la seconde.

— Qu’y a t-il ? osa demander Bérénice.

— Ils parlaient d’une enveloppe. Avec un secret. Et j’ai trouvé une enveloppe tout à l’heure, je l’ai prise en pensant la remettre à Monsieur lorsque le repas serait terminé. Mais si je lui donne, il pensera que je suis celui qui a écrit cette lettre. Comprenez-vous ?

— Non, pas vraiment. L’enveloppe contient-elle une information si importante que cela ?

— Je l’ignore. Jamais je n’aurais ouvert ce bien. Seigneur tout puissant, ce serait presque un crime.

— Oh, ça va, n’exagérons rien, répliquait Bérénice en s’emparant de l’enveloppe pour l’ouvrir et sortir le petit carton à l’intérieur.

— Nooon, fit le domestique en cachant ses yeux derrière ses mains.

L’instant d’après, il faisait un signe de croix et joignait les mains.

— C’est tout ? Tout ce boucan pour ça ? Ce n’est qu’un mot écrit sur un papier. En plus ça ne veut rien dire. Je vous le dis mes chers amis, ce mot n’a été écrit et laissé à la vue des invités seulement pour créer des disputes entre les convives. C’est certain. L’idéal est qu’il disparaisse. Tout de suite.

— Qu’il disparaisse ? Mais… commençait Pola.

D’un geste Bérénice craqua une allumette et enflamma l’enveloppe qu’elle laissa se consumer dans l’évier.

— Ohh misère, oh ce n’est pas possible, répétait le domestique dont le visage passait du rouge au blanc.

— Asseyez-vous mon ami. Vous êtes si pâle d’un coup.

— Vous avez brûlé l’enveloppe, constatait Pola avec les yeux écarquillés.

— Comment ? De quoi parlez-vous ? Je n’ai jamais vu d’enveloppe. En serait-il autrement pour vous ?

Pola et le domestique échangèrent un regard. Bérénice fit couler de l’eau sur les cendres et passa un coup de chiffon dans le bac pour qu’il soit impeccable.

— Et voilà. De quoi parlions-nous déjà ?

Les deux autres restèrent stoïques et silencieux.

— Ah mais oui, nous en étions au dressage du dessert. Et bien qu’attendez-vous pour venir m’aider ?

Tous deux vinrent auprès de leur amie pour aligner les petites assiettes à dessert.

— Il faut faire ça bien, Monsieur aime que tout soit parfait. Surtout les fruits au-dessus de la crème pâtissière. Vous savez comme Monsieur est perfectionniste. Il aura eu suffisamment d’émotion ce soir sans ajouter un dessert mal présenté.

— Mais puisque je dis qu’il n’y a aucun secret ! hurlait une voix dans la pièce d’à côté.

— C’était écrit ! criait la voix stridente d’une femme.

— Moi je ne crois que ce que je vois ! Alors montrez-moi votre foutu secret s’il existe !

— Je l’ai vu, s’agaçait un homme. Pourquoi dirais-je ça dans le cas contraire ?

Des bruits de pas et Albert Despuits surgit dans la cuisine.

— Je crois que nous allons écourter ce dîner. J’ai une migraine qui me tape sur les tempes.

— Bien Monsieur, répondit poliment Bérénice.

— A tout hasard, vous n’auriez pas aperçu une enveloppe ? s’enquit le maître des lieux.

Les trois domestiques se jetèrent des regards furtifs.

— Une enveloppe ? interrogea Pola avec un air étonné.

— Nous n’avons rien vu, tranchait Bérénice. En dehors des aliments et des couverts bien sûr.

— Evidemment, sourit Albert.

Sur ces mots il reparti et les deux femmes aidèrent leur ami à se rasseoir avant qu’il ne perde l’équilibre.

— Seigneur, gémit-il en refaisant un signe de croix.

— Ne vous mettez pas dans cet état mon cher ami, commença Bérénice en attirant Pola pour passer un bras sur ses épaules. Tout ira bien, ce sera notre petit secret…

 

Cette histoire est un premier jet pour un challenge sur le thème du "secret."

Couverture : créée sur Canva

 

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