- Enfin... Nous les avons enfin trouvés...

La forêt, paisible et silencieuse jusqu'alors, grouillait des monstres épouvantables avides de chairs et de sang. Leur chef Gordred, un puissant mage noir, marchait parmi eux. Son rire diabolique faisait trembler la nature qui l'entourait. Sa voix gutturale était forte et terrifiante. Mais le plus effrayant chez lui était son apparence : il portait un exosquelette d'insecte lui donnant une allure de démon qui camouflait son corps et son visage. Impossible de dire qui se cachait derrière cette horreur.

- Rongor ! Va trouver les autres. Nous attaquerons la cité à l'aube. Cette fois-ci, ils n'ont aucune chance de nous échapper !

Un rampant hideux sortit de l'ombre et s'inclina devant Gordred avant de s'enfoncer dans la forêt. 

- Pendant ce temps, je vais m'amuser un peu avec nos amis. Voilà bien longtemps que nous ne nous sommes pas vus...

Il leva la main et une nuée de vivroques, des mouches venimeuses, envahirent l'immense clairière et disparurent comme par enchantement. Des cris de douleur retentirent soudain, suivis de bruits de lutte et de soupirs d'agonie. Une mélodie bien douce aux oreilles de Gordred qui ne put contenir un rire de satisfaction. Les yeux fermés, il profitait de ce merveilleux concert de hurlement lorsque son armée arriva. 

- Parfait, mes amis. Je peux dès à présent lever le voile et vous ouvrir les portes d'Yflaïr. Vous pouvez tuer les plus jeunes et les femmes, mais je veux les hommes en vie. Tous sans exception. Parmi eux, se cachent nos illustres hôtes et j'ai besoin d'eux vivants ! 

Un grognement atroce sortit de la gorge de Gordred. Le sol trembla et un merveilleux village apparut. La cité sœur d'Ysaldore... Sans attendre, les guerriers de Gordred s'engouffrèrent dans les rues, ravageant tout sur leur passage. 

Le mage noir avança pour profiter pleinement du spectacle. Un tableau somptueux aux camaïeux de rouge et de noir. Une douce odeur métallique rehaussée par le parfum de la chair brûlée vint flatter ses narines. Il s'en délecta en émettant un petit gloussement de plaisir. Cela lui ravivait des souvenirs plaisants. De cette fabuleuse nuit sur Luna, lorsqu'avec ses démons, il avait marché sur Ysaldore. Lorsqu'il avait pris le pouvoir aux ainés... Depuis, il vivait une retraite quasi parfaite : il se régalait de tous ses visiteurs curieux, s'amusait avec leur corps et leur âme à l'abri des regards dans les dédales de la bibliothèque tout en maintenant l'illusion parfaite du paradis. Mais ce qu'il ignorait, c'était qu'Ysaldore avait besoin de la magie des anciens pour survivre... sans quoi, elle se laissait dépérir et de sa putréfaction était née l'infestation immonde et pullulante de créatures abjectes qui aujourd'hui constituaient son armée.

Il avait tenté plusieurs fois de localiser les fugitifs. En vain. Leur cité était partout et nulle part à la fois. Liée à aucun plan de l'espace. Tous ses pouvoirs étaient inefficaces face à la magie et à la technologie de ces lâches. Il ne comptait plus les nuits passées dans ces bois à la recherche d'une trace, d'un indice. Heureusement, il n'avait pas toujours perdu son temps. Il avait eu la chance de tomber sur un groupe restreint de soldats. Parmi eux, des femmes enceintes de quelques semaines ou peut être quelques mois, mais elles semblaient l'ignorer. Sinon pour quelle raison auraient-elles pris les armes ? Sans se faire remarquer, il avait lancé un puissant sort visant à amputer les utérus et les mioches qu'ils contenaient pour les envoyer vers Ysaldore dans des capsules magiques. Cinq en tout. Cinq descendants directs des ainés qu'il allait pouvoir façonner à son image. Utiliser à sa guise. Mais tous s'étaient montrés décevants. Tous sauf un : le petit Ysak.

Image créée par Cédric Gérard à l'aide de l'IA Midjourney. 
Texte de L. S. Martins (45 minutes sans relecture).