X-Men : Jeunes filles en fuite
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X-Men : Jeunes filles en fuite
J’en ai lu des trucs bien, des trucs excellents, des trucs grandioses ces dernières années. Mais j’ai choisi de vous parler de X-Men : Jeunes Filles en Fuite. Je sais, je suis difficile à suivre par moment.
Parce que malheureusement je ne pourrai pas en faire l’éloge, dieu sait que j’aurais pourtant bien aimé. Mais malgré toute la mauvaise foi dont je sais parfois faire preuve, malgré tout l’aveuglement qui me pousse à aimer contre l’avis général et le bon goût institutionnalisé des œuvres un peu à part, malgré mon manque d’objectivité dès lors qu’un artiste que j’aime particulièrement est en cause… malgré tout ça je ne peux pas vous dire que ce comics est bon.
Pourtant ce sont les X-Men. Mieux : les X-Women, et pas des moindres. Pourtant c’est Chris Claremont qui écrit, le scénariste emblématique qui a mené les X-Men au firmament des comics dans les années 80. Pourtant c’est Milo Manara qui dessine, LE maître italien de la bande dessinée et de l’érotisme soft et classe.
Bref, théoriquement ça avait tout pour plaire. Et la préface dithyrambique de Joe Quesada (le rédacteur en chef de Marvel de l'époque) laissait présager du tout meilleur. Ben non. Que dalle. Queud'chi. Nada.
En gros je vais vous résumer quand même. Les femmes de l’équipe des X-Men (il y a là : Tornade, Psylocke, Marvel Girl, Malicia, et Kitty Pride) partent en vadrouille en Grèce, histoire de prendre un peu de vacances, elles le méritent bien faut dire. Sur place l’une d’entre elles, Marvel Girl, est kidnappée. Les autres partent à sa recherche et leur enquête les mènent à Madripoor (une île imaginaire d’Asie, sorte de Singapour du Marvelverse). Après avoir perdu leurs pouvoirs (la faute à la baronne Krieg qui a également kidnappé Emma Frost pour mener à bien son plan machiavélique… argh), les X-Women tombent entre les mains de pirates, qui en font leurs esclaves (re-argh)(tu me diras quand tu vois les donzelles, tu peux comprendre). Mais de mystérieux hommes armés essaient d’éliminer les pirates, qui vont devoir s’associer aux X-Women pour en venir à bout (re-re-argh). Tout cela se termine par la résolution d’un complot mondial qui devait aboutir à une guerre indo-chinoise (fin du calvaire).
Voilà.
Ça fait peur, je sais. Et encore j’ai essayé de vous ménager hein. Je n’ai pas parlé des problèmes de couple du chef des pirates, ni du passage où le bateau des filles est pris dans une immense chute d’eau dont elles se sauvent grâce à une liane bienvenue. Faut dire qu’elles ont la bonne idée de tomber l’une après l’autre afin que Kitty Pride les rattrape et les sauve à tour de rôle.
À ce niveau là d’indigence, on ne peut même plus vraiment parler de scénario. C’est pourquoi je passerai sous silence les ellipses monumentales et les incohérences de Claremont. Le coup des pouvoirs annulés je veux bien, mais quand ça ne s’applique qu’à certains personnages (les X-Women) et pas à d’autres (le chef des pirates), je ne comprends plus trop. Mais bon, passons. Comme dit, on n’est plus à ça près. On a qu’à combler les trous nous-mêmes, un peu d’imagination bordel.
En revanche qu’est-ce que c’est beau. Milo Manara n’est pas adulé pour rien, et il le démontre encore une fois ici. Chaque planche est somptueuse, et il se fait bien plaisir avec les super-héroïnes qu’il met en scène. Faut dire qu’il a du potentiel à exploiter : une black, une asiatique, une rouquine, une blonde incendiaire, Malicia et son air de pas-y-toucher et la brunette Kitty Pride qui prend les traits classiques des héroïnes standardisées made in Manara.
Bon, je sais que Manara n’a pas été embauché pour rien, mais je ne peux pas m’empêcher de me dire en regardant ses dessins, qu’en fin de compte les X-Women sont une belle bande de coquines fieffées salopes (‘scusez le langage hein, mais appelons une chatte une chatte). Entre poses suggestives, tenues ultra-courtes, rapprochements saphiques et allusions sexuelles explicites, Manara s’est fait plaisir mais il n’a pas fait dans la dentelle. Je ne vais pas jouer au choqué (bien au contraire, je ne lis pas Manara pour ses décors architecturaux hein), c’est juste que ça m’a fait bizarre de voir ces super-héroïnes dans un contexte pareil. J’avais presque l’impression de voir un détournement grivois comme on en voit parfois quand Popeye se tape Olive ou Tintin se fait Milou. Bon j’exagère peut-être un tout petit peu, mais franchement, on n’en est pas si loin que ça. En plus classe et plus sexy, mais le sentiment général est là. Quand on regarde les planches de ce comic, on se dit clairement que chacune des héroïnes aurait sa place en guest star d’un film estampillé Marc Dorcel. Faut dire aussi (et c’est pas nouveau) que dès que Manara dessine une femme avec la bouche ouverte on a l’impression qu’elle est à deux doigts (vous prendrez bien un peu de whisky Odile ?) de l’orgasme. Et quand on associe ça au scénario à deux balles qu’a pondu Claremont, moi j’ai cru me retrouver devant un téléfilm érotique de deuxième partie de soirée sur C17. Remarquez, d’habitude dans les comics les héroïnes sont peut-être plus prudes mais arborent des nibards siliconés qui les empêchent de refaire leurs lacets de chaussures (d’où leurs bottes soit dit en passant – tout s’explique toujours hein, c’est hyper-cartésien les comics en fait). Là au moins avec Manara on a droit à un peu plus de crédibilité, dans les proportions anatomiques j’entends, à défaut d’autre chose.
Alors voilà, je ne peux pas dire que ce comic est bon, définitivement pas.
Mais malgré tout… ce que j’ai lu ne m’a pas plu mais ça m’a plu de le lire (soupirs d’incompréhension dans la foule de mes lecteurs interloqués). Un peu comme un petit plaisir inavouable. Mais je ne saurais vous le conseiller. Sauf peut-être à un ou deux pervers notoires qui lisent ces lignes. Si, si, il y en a. Je les connais.
Je cherche comment clore ce billet et résumer en une phrase ce que j’ai pensé de X-Men : Jeunes Filles en Fuite… tiens je crois que j’ai trouvé :
Qu’est ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est con, mais qu’est-ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est con, mais qu’est-ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est con, mais qu’est-ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est con, mais qu’est-ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est con, mais qu’est-ce que… (ad libitum)
Cet article a été initialement publié sur mon blog : www.moleskine-et-moi.com