Mon beau sapin, roi du salon
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Mon beau sapin, roi du salon
Prenez deux ouvertures, celle de la première case du calendrier de l’avent et celle des cadeaux tant attendus. Entre les deux, la période de Noël et ses traditions, dont une qui en est devenue le symbole : le sapin.
Tout d’abord il faut partir en quête du spécimen rare. Les zones commerciales n’ont rien en commun avec les forêts vosgiennes mais on y trouve cependant un large choix de conifères. Le caddie a tout simplement remplacé la hache. On choisit un sapin un peu comme on adopte un chien ou un chat, on s’engage à le choyer. On le veut vigoureux, toutes épines dehors, ni trop petit ni trop grand, d’un vert unique tellement caractéristique qu’il en a pris le nom : vert sapin.
Evidemment, à la maison, on lui réserve une place d’honneur car le temps de quelques semaines, ce sera lui la star. Pour cela on n’hésite pas à dégager fauteuil ou guéridon. On l’installe non sans difficulté car, inévitablement, chaque membre de la famille intervient pour imposer son sens de la verticalité. Tant bien que mal le sapin finit par trouver sa position et gare à celui qui ose une dernière manipulation.
Ensuite on descend chercher à la cave le carton qui contient les décorations, un trésor tout droit sorti de la caverne d’Ali Baba. Un carton tellement vieux qu’on a oublié depuis longtemps ce qu’il contenait à l’origine. Il est rangé bien en hauteur et se fait oublier onze mois sur douze. Mais une fois par an, le carton remonte à la surface, respectant une coutume sacrée à l’instar des vierges qu’on exhibe pendant les processions du 15 août. L’ouverture est toujours un émerveillement : chaque boule et chaque guirlande, ayant sa propre histoire, réfléchissent bien plus que de la lumière. Elles rayonnent de souvenirs. Cet ange acheté dans telle boutique, cette étoile confectionnée par des petites mains, cette boule qu’on a toujours connue… tous appartiennent au patrimoine familial.
Alors vient mon moment préféré : la décoration du sapin. Le protocole ancestral est rigoureusement suivi chaque année : d’abord les boules, puis les guirlandes et enfin les lumières. Lumières blanches et lumières colorées clignotent alternativement selon un savant tempo. Au cours de ce rituel, un maître mot domine : l’harmonie. Harmonie des couleurs et harmonie des formes. Les plus beaux sujets en hauteur, les plus communs vers l’arrière, les plus fragiles nichés entre deux branches. Les guirlandes forment un réseau alambiqué tout en scintillement et les lumières recouvrent le sapin d’une constellation insolite.
Il ne manque plus que la touche finale : l’étoile qui brillera en hauteur. La cime, taillée comme un diamant, est prête à la recevoir. Qui aura le privilège de la poser, tel un alpiniste qui plante son drapeau sur le sommet de l’Everest ? Le plus petit monte sur les épaules du plus grand et c’est ainsi que le sapin, paré de son costume de sacre, devient le roi du salon.
Photo Julita/Pixabay