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"Il n'y a même plus moyen de débattre, j'ai le seum" : LA PAIX DES MOTS VAINCRA SUR LES MAUX

"Il n'y a même plus moyen de débattre, j'ai le seum" : LA PAIX DES MOTS VAINCRA SUR LES MAUX

Publié le 7 mars 2022 Mis à jour le 11 mars 2022 Éducation et formation
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"Il n'y a même plus moyen de débattre, j'ai le seum" : LA PAIX DES MOTS VAINCRA SUR LES MAUX

(source d'espoir face à l'inconsciente jurisprudence Samuel Paty)

 

Dialogue entre un père et son fils (en garde alternée) le 7 mars 2022 à 17h47, dans le salon/cuisine au retour du lycée. 

- Il n'y a plus moyen de débattre, j'ai le seum.

- De quoi parles-tu, Enzo ?

- Arrête de m'appeler Enzo, ça m'infantilise.

- Ça tombe bien, t'es mon fils !

- So funny daddy, "t'as mangé un clown ?" pour parler comme toi.

- C'est bon Enzo, je plaisante. On a choisi ce prénom avec ta mère parce qu'il nous plaisait. Tu l'ignores peut-être : il nous plaît toujours, donc permets-moi de t'appeler par ton prénom.

-Tu t'en fous dans le fond de ce que je te raconte.

- "Il n'y a pas moyen de débattre, j'ai le seum." Je suis peut-être un vieux croulant en devenir qui infantilise son lycéen de fils, mais un vieux croulant qui t'écoute.

- J'avais précisément dit "plus moyen de débattre" et je parle du lycée. Les profs ne quittent plus ce putain de programme que l'Education nationale leur dicte. Ça me fout le seum, ouais.

- Dois-je comprendre que vous n'échangez plus avec vos profs ?

- Non, on parle. Ne déforme pas mes propos. Monsieur Benzaouï n'est pas Poutine, il nous écoute. (silence) Heureusement, on vit en France.

- Qu'est-ce qui nourrit ton courroux, dans ce cas ?

- T'es drôle papa avec ton langage soutenu. Ça te fait un point commun avec Monsieur Benzaouï. 

- Heureux d'avoir ce dénominateur commun avec ton cher  de lettres qui m'a fait bonne impression lors de l'échange de janvier. Eclaire-moi cependant sur le manque de débats que tu regrettes.

- Que ce soit lui ou un autre,  il ne sort pas du cadre. J'aime bien l'étude de textes de Rousseau que Benz...

- Ce bon vieux Jean-Jacques ?

- Je te préviens, tu me coupes encore une fois la parole pour glisser tes blagues de merde, et je me casse.

- Pardon.

- Rousseau, c'est un thug. Tu savais qu'il montrait sa teub ?

- Je comprends à peine ce que tu exprimes. Sérieusement, j'ai rien contre le brassage des langues. Essaie seulement de te mettre à ma place. Guedin, ouf, chanmé, gadjio, crevard, kiffer : le verlan, les mots à consonnance arabe - phrase que j'emprunte à Nekfeu, que j'apprécie soit dit en passant - et les expressions issues du monde manouche, je capte.

- Tu saisis donc le sens de teub vu que tu assimiles le verlan, cher papa lettré ?

- Effectivement, j'ai compris teub. T'aurais néanmoins pu employer sexe par exemple.

- Bite, ça t'aurait choqué ?

- Continue Enzo. Parle mieux s'il te plaît, ne serait-ce que pour arriver au bout de cette discussion. (pause) Que l'on se comprenne sans devoir se demander la signification de nos mots.

- OK, je vais à l'essentiel. Dans Les Confessions, Rousseau se lance dans une autobiographie des cinquante premières années de sa vie. On est au milieu du 18e siècle. Le mec raconte se cacher dans des caves à Turin, en Italie.

- Merci pour la précision géographique.

- (regard noir) A Turin DONC, Rousseau se cachait derrière un poteau et ouvrait son manteau aux passantes.

- Nu comme un ver de terre ?

- Miskine, il montrait son pénis - ça te va formuler de la sorte ? (sourire en coin). Le pire dans toute cette histoire, c'est que Rousseau est devenu une référence littéraire, qu'on l'étudie dans les lycées depuis des lustres. Tu l'as étudié ? Mamie LuLu l'a lu dans son cursus scolaire. Je le sais puisqu'on en a parlé ensemble dimanche.

- Miskine ?

- Tu demanderas à ton copain Google.

- OK Google. OK Enzo. J'aime beaucoup notre discussion mais un call m'attend dans 10 minutes. T'auras le temps de finir ton histoire ou on remet ça à l'heure du dîner ? Je ne peux pas me permettre d'être en retard ; mon interlocuteur est un potentiel gros client.

- Pas de souci. Amir et Micha ont voulu rebondir sur l'actualité en Ukraine auprès de Benzaouï. Spécifiquement sur la liberté des écrits qui leur semblaient plus élargie en France trois siècles avant nous.

- Je ne te suis pas, m'en veux pas.

- C'est complexe à expliquer, je divague. Comme en classe, je réalise. Cette discussion est partie d'une de mes remarques sur le fait qu'on peut aujourd'hui tout dire, tout filmer, photographier ou écrire. Sauf que j'ai l'impression qu'avant les réseaux sociaux et l'immédiateté de l'information... Non, je reprends : l'immédiateté d'informations récoltées par un journaliste, relayées et déformées par d'autres journalistes ou citoyens malintentionnés à des fins politiques, fait qu'on oubliera ces informations manipulées dans le flux des serveurs d'Internet. J'entends par oubli ce qui restera des événements de mon siècle. Alors qu'en 1765 Rousseau écrivait ses mémoires, dont la véracité pouvait être discutable mais qui ont été imprimés à l'époque, et ses mémoires marquent l'Histoire.

- Tu m'impressionnes fiston. Ta faculté d'analyse me touche. Je n'ai pas saisi le rapport avec la guerre en Ukraine, du moins comment Micha et Amir ont amené l sujet. Ce que je crois avoir compris de ton histoire, et tu me reprendras si mon discours manque de clarté : la mort de Samuel Paty, décapité pour avoir fait son métier - à savoir rendre citoyens des adolescents scolarisés à l'Ecole publique - affaiblit le débat. Les enseignants craignent pour leur vie face aux complots et à la désinformation. 

- Tu m'as compris papa. Poutine gagne du terrain grâce à la désinformation.

- N'oublie pas que Marine Le Pen, Éric Zemmour et les candidats d'extrême-droite procèdent de la même manière pour la Présidentielle. Les extrêmes fonctionnent ainsi en général.

- Je n'avais pas vu le danger ainsi chez nous (Enzo se gratte la tête). On ne va pas s'arrêter de débattre au lycée ? L'Ecole publique, comme tu l'appelles, n'a pas le droit de nous faire taire, de ne pas écouter ce que nous, les jeunes, avons sur le cœur.

- Continue à te battre par les mots pour que le débat vive entre tes professeurs et tes camarades de classe. Enzo, je suis ému de la paix que tu diffuses autour de toi.

- Merci papa. Ne va pas te mettre en retard pour ton call.

- Oh oui, merci. J’allais l’oublier sous le coup de l’émotion. De mon call ne dépend pas la stabilité du monde, mais je vais user de diplomatie pour gagner ce contrat et bâtir ensemble à l’avenir de beaux projets (clin d'œil en faisant le salut d'un général militaire avec l'accent russe).

 

Photo by Dima Pechurin on Unsplash

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