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Touche pas à ça p'tit con!

Touche pas à ça p'tit con!

Published Jul 22, 2022 Updated Jul 22, 2022 Education and Training
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Touche pas à ça p'tit con!

 

Quand Pithiviers, de la septième compagnie, fait le malin dans le train en prétendant connaître le fonctionnement de la locomotive, le seul truc qui marche c’est le bouton pompeusement appelé «  Touche pas à ça p’tit con ! ».

Dans une période pompeusement appelée « déconfinement et retour au collège », le seul truc qui aurait pu fonctionner c’est « Touche pas à ça p’tit con ! »

Ce matin c’était donc le retour au collège pour quelques joyeux drilles, dès potron minet, où ils devaient être pris en main et briefés par mes chères collègues, recevoir la sainte parole directement descendue du ministère de la coopérative de la Fraise Nationale.

A priori tout avait fonctionné comme sur des gariguettes : masques sur le visage, mains sur la table, silence religieux… Un état de grâce, digne d’être filmé.

 

Et puis, l’erreur de cadrage, la boulette dans la mise en scène..Voilà notre Choup qui se gratte furieusement le masque, puis sous le masque.

 

- Attention Choup, tu ne dois pas toucher ton masque, on te l’a expliqué ce matin je crois.

- Oui mais ça me gratte, j’ai attrapé un coup de soleil.

- Je comprends bien ( il a en effet le visage rougeaud d’un routier polonais qui se serait endormi sur l’herbe de l’aire d’autoroute entre Théoule sur mer et Riom ) mais dans ce cas, il vaut mieux que tu poses délicatement ton masque pendant le cours sur ta table. D’accord ?

 

Pas le temps de le laisser me répondre, voilà notre Droopy qui fourrage dans son sac et qui sort et range et qui sort et qui range des cahiers.

- Mais que fais-tu ? Ça n’est pas le moment ! Laisse tes cahiers sur la table.

- Non il faut que je les range dans mon sac, ma mère veut que je les ramène.

- Non, on vous a expliqué ce matin, vos affaires doivent rester au collège, on ne ramène pas de matériel à la maison, ni en classe.

- Oui mais ma mère a dit de ramener mes cahiers parce que maintenant on a l’imprimante.

- Peu importe, tu sors les cahiers de ton sac et tu les poses sur la table.

 

Bon le masque et les cahiers sont sur la table, continuons…

 

 

Arghhh voilà Choup qui se prend pour Thierry la Fronde, l’élastique du masque au bout des doigts !

 

- Veux-tu bien poser ce masque ! Il est sale maintenant donc tu ne peux plus le mettre. Range le ! Non Droppy, je parle à Choup, toi tu laisses tes cahiers sur la table !

- Oui mais ma mère elle a dit, parce que maintenant on a l’imprimante .

-Ne t’inquiète pas, on trouvera du temps pour le faire le travail en retard, donc lâche ces cahiers, et remets toi au travail.

 

Une ombre dans le dos, c’est Zébulon qui s’est levé et qui crapahute à 4 pattes sous la table de son voisin de derrière.

 

- Non mais je peux savoir ce que tu fais ?

- Mais m’dame, mon crayon est tombé alors je vais le chercher.

- Oui mais non, on ne se déplace qu’avec son masque, donc tu retournes t’asseoir et tu restes un peu tranquille.

Un peu de gel hydroalcoolique et hop on s’y remet.

Et revoilà Droppy qui boude. Décidément cette histoire de cahier c’est comme le scotch du capitaine Haddock, elle va nous coller au doigt toute la journée.

Et Zinzin qui ne peut pas bouger commence à ressembler à un bébé, le nez sur le décolleté de la copine de maman, et qui sent bien qu’il y a une arnaque !

Il est même prêt à acheter un sac entier de velleda, juste pour venir au tableau écrire la date, se doucher au gel hydroalcoolique pour distribuer les photocopies… Prêt à tout le pauvre gars.

 

Alors en attendant des jours meilleurs il a décidé de percer le bouchon de sa bouteille d’eau avec un compas, il paraît que ça fait gourde… Une idée qui paraît d’un coup être le coup du siècle, car je les vois déjà, les yeux humides d’admiration et de convoitise tendre leurs petites mains avides vers leur bouteille et leur compas..

Pour éviter toute visite intempestive aux urgences pour perforation volontaire et disgracieuse de la main gauche, je décide de déplacer tout le monde sur l’herbe du plateau sportif pour une lecture ensoleillée et a priori reposante ( surtout pour moi ).

L’histoire «  Tous les chemins mènent au ciel » est celle d’une femme victime d’un tic nerveux à l’oeil qui se manifeste dès qu’elle pense être en retard. La version newyorkaise permanentée du lapin toujours à la bourre d’Alice au pays des merveilles. La vieille a donc une obsession : la peur d’être en retard. Et là Zébulon se rapproche de moi, et me dit à l’oreille :

- L’obsession c’est comme Droppy et ses cahiers non ?

 

Humm observation pertinente et providentielle mon cher, mais pour l’instant il est l’heure de remonter et de préparer les sacs pour rentrer à la maison. Pas le moment d’être en retard.

 

On rappelle les règles, bon vous voyez lesquelles ? Les cahiers, la maison, les masques..Non Droppy, tu ne mets pas tes cahiers dans ton sac.

 

Ce matin, ils ont reçu 4 masques, et un petit sac plastique blanc pour ranger les dit masques. Donc on récapitule, le premier masque celui du matin, il est sale, donc dans le sac, celui de cet après midi, il a potentiellement servi de fronde, donc il n’est pas inutile de le ranger dans le sac lui aussi pour certains. Haut les masques on enfile le suivant pour sortir dans le couloir.

 

J’ai d’un coup le sentiment d’être un médecin senior, accompagné de ces internes, pour la visite du matin. Mais zut, j’ai un interne à la traîne, sans masque, il fait quoi à fourrager dans ses poches ? Il a perdu son stéthoscope ou son thermomètre ?

 

C’est notre Choup qui cherche son masque, un des deux qui devaient être sur sa table depuis le matin. Les deux premiers sont bien dans le sac, mais 2 + 2 disparitions ne font pas 4 masques.

On tient les distances, on regarde un peu partout, quand d’un coup il semble qu’il a une illumination, il commence par fouiller son sac ! Miracle, le masque y était. Recouvert de rognures de crayons mais il y est. Pour le coup dans le protocole il n’y a rien sur les rognures de crayon.

Allez on est à un masque de la victoire ! Il fouille maintenant ses poches ! Bingo le deuxième refait surface, cette fois recouvert de miettes, mais il faut admettre qu’il n’est pas facile de remonter indemne d’une plongée en poche sombre. Et toujours rien dans le protocole sur les miettes de sandwich.

 

Alors moi je veux bien qu’on nous ponde des protocoles, des informations, des obligations diverses et variées, mais je me demande quand même si un viril «  Touche pas à ça p’tit con ! » ne serait pas une efficacité redoutable dans certaines situations !

 

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